CHAPITRE 4 - CHRONIQUE DE BOURTHEROULDE

CHRONIQUE DE BOURGTHEROULDE

 

            En 1118, après la mort de Robert de Meulan, les gens du pays de Bray ravagent le Roumois. En 1122, Henri d'Angleterre brûle Pont-Audemer. Il incendie et dévaste le pays à plus de vingt milles à la ronde. En 1131, Galéran de Meulan se rapproche de Geoffroy d'Anjou. Toute la noblesse du Roumois fait sa soumission. En 1204 la Normandie est rattachée à la France. Vers 1211, le bourg est le chef-lieu d'un doyenné du diocèse de Rouen. En 1264, ce doyenné est composé de quarante-trois paroisses. En 1248, la population du village est d'environ 800 habitants. Il y a 80 chefs de famille. Il est habituel que trois générations se côtoient dans la même maison. En avril 1252, une charte du cartulaire de Bonport révèle la présence d'un hôpital ou Maison-Dieu à Bourgtheroulde.

            La peste, apparue en Crimée, est apportée par les navires des négociants et atteint les côtes françaises en 1347. Toutes les couches de la population sont touchées. En 1348, près d'un Français sur trois en meurt, succombant en l'espace de quatre à cinq jours. L'une des conséquences de la « grande peste » des années 1348-1349 crée pour longtemps une grande fragilité sanitaire de la population, qui engendra disette et marasme économique. Au 14ème siècle, la mesure de Bourgtheroulde est en usage dans les paroisses situées autour. La vigne est cultivée mais le vin est réservé aux riches. Le pommier et le cidre n'apparaissent qu'au siècle suivant.

            En 1419, les Anglais occupent Rouen et les pays alentour. En 1470, la paix revenue, l'archevêque approuve des quêtes en faveur de l'hôpital dont il nomme différents aumôniers.

La peste s'installe en 1479, 1483, 1502, 1512, 1513, 1518 à Pont Audemer et aux alentours. 1522 et 1524 furent des années de disette.

En 1546, l'hôtel-Dieu de Bourgtheroulde était toujours en fonction. On ignore à quel moment il disparut ainsi que son emplacement. Une léproserie existait en 1595 à Bourgtheroulde, située au hameau de La Poterie. S'agit-il de la Maison Dieu dont on ne retrouve plus de traces ? Cette léproserie était construite, comme les établissements semblables de l'époque, à l'écart du village. C'était un lieu d'accueil pour les lépreux qui s'y réfugiaient, le plus souvent contraints et forcés.

            En 1617, Bourgtheroulde est érigé en baronnie. Le parc du château du seigneur, entouré de murs de briques, contient une maison ancienne avec vue sur le jardin, un logis en vis-à-vis, un colombier, des bâtiments. Les jauges, poids et mesures, différents de ceux de Rouen, relèvent de la baronnie de Bourgtheroulde En 1632, Bourgtheroulde est composé de soixante-dix à quatre-vingts maisons. Il y a de très belles halles à blés, bouchers, merciers, têliers (*teillers, de teille : écorce de la tige du chanvre, nécessaire à la fabrication de certains draps). Au XVIIème siècle, la fabrication des draps est une spécialité de Bourgtheroulde.

            Les registres paroissiaux de Bourgtheroulde débutent en 1668. Ils sont riches d'enseignement. Les actes de naissances et de décès fourmillent de précisions. Si le Pavé du Roi (*actuelle Grande Rue) accueille commerçants et artisans, le village est surtout habité par des journaliers, laboureurs, toiliers, tisserands et cordiers. La proximité d'Elbeuf, cité drapière, conditionne la vie des habitants. Il y a quelques potiers et briquetiers. Les salaires sont misérables. Le pain est l'élément essentiel des pauvres. Au 17ème siècle, une famille pauvre de cinq personnes (deux adultes et  trois enfants) consomme environ quatre kilos de pain par jour. Le salaire mensuel étant d'à peu près vingt livres soit le prix de deux cents kilos de pain, la moitié des revenus d'une famille est consacrée à l'achat de cette denrée irremplaçable. Les couples ont de nombreux enfants. La mortalité infantile est effrayante. Les mères meurent souvent en couches ou d'épuisement. Les veufs se remarient rapidement, ne pouvant s'occuper de leurs enfants orphelins de mère. De nombreuses familles accueillent des nourrissons qui leur sont confiés par l'Hospice des Pauvres Valides de Rouen, futur Hôtel Dieu ou par des boutiquiers et artisans de Rouen et d'Elbeuf. Les enfants, certains âgés de quelques jours, sont transportés dans de grands paniers accrochés aux flancs des chevaux ou des ânes. Les plus robustes survivent. Les conditions d'hygiène sont effroyables. Les registres paroissiaux mentionnent les décès de ces enfants, âgés de un ou quelques jours, déclarés par leurs parents nourriciers. Les actes de sépulture des enfants trouvés ou abandonnés, placés par l'Hospice de Rouen, précisent qu'ils portent une médaille, comportant un numéro, attachée au cou par un ruban.  Cette possibilité d'accueil, source de revenus, a perduré jusqu'à une époque assez proche. .Dans la seconde moitié du 17ème siècle, une partie de la forêt de La Londe est défrichée. Les terres cultivées et les maisons construites sur les endroits essartés font partie de la paroisse dont le curé vient en premier y administrer les sacrements. C'est une façon de faire la course aux paroissiens payant la dîme. Ce qui donne lieu à de nombreuses contestations entre curés de différentes paroisses.

             Le domaine de Nicolas Le Roux est composé d'un manoir et d'un château, un grand parc clos de murailles de briques, colombiers à pied et à garenne. Il est compris entre le grand chemin de Bourgtheroulde à la Bouille, la rue d'Infreville, les jardins, le chemin qui va au moulin d'Infreville. Les habitants de Bourgtheroulde et d'Infreville sont tenus de payer les impôts prélevés par le seigneur de Bourgtheroulde, mais aussi par le marquis de La Londe, en particulier au moment de la foire de la Saint Laurent et du marché du samedi.

            En 1690, deux hôtelleries existent : Le Gouffre et l'Image de Saint Nicolas. En 1693, une profonde misère s'installe dans toute la France provoquée par la sécheresse suivie d'une grande pauvreté. De nombreux décès sont constatés les deux années suivantes. En 1694, trente-cinq enfants décèdent à Bourgtheroulde, vingt-sept à Infreville. La mortalité n'épargne pas les adultes. Des familles entières disparaissent.

            En 1710, à l'exception de deux ou trois laboureurs, le village est misérable, la population fatiguée par le transport des bagages des troupes. Les registres paroissiaux révèlent des faits divers. Des carrières de marne sont exploitées : 1721 - Le dix neuf juillet mil sept cent vint et un a esté inhumé dans le cimetière de cette paroisse le corps de Nicolas Vittecoq de Bourgtheroulde aagé de 35 ans suivant un mandement de Monsieur le lieutenant général de Pont Audemer en date du 18 dud. (du dit) mois et an par lequel a autorisé à faire la levée du corps lequel avoit esté suffoqué par les mauvaises exhalaisons d'une espèce de marnière qu'il tiroit de la terre pour faire de la potterie sur la paroisse d'Infreville. L'inhumation du consentement de Monsieur le curé d'Infreville et en présence des témoins soussignés.Le protestantisme est présent. Les pratiquants sont frappés d'interdiction d'inhumer dans le cimetière paroissial, sauf cas exceptionnel. Le registre paroissial de Bourgtheroulde en fait foi : 1726 - Suivant une lettre de Mr l'abbé Bridellon vicaire général de Mons.gr (Monseigneur) l'archevêque de Roüen de ce iourdhui, par laquelle vu l'exposé qui leur a esté fais que Damoiselle Esther de Convais aagé de cinquante cinq ans fille de feu Ms.re (Messire) Jean de Convais escuyer, a demandé les ministres de l'église avant sa mort, prevenant le d. (dit) sieur que la crainte des jugemens de Dieu luy avoit inspiré quelques mouvements de conversion, a permis que le corps de lad. (la dite) Demoiselle fust porté dans un coin du cimetière de cette paroisse, sans prière, sans chant, sans cérémonie, accompagné seulmt (seulement) d'un ptre (prêtre) et de quelques frères de la Charité, sans porter le d. (dit) corps dans l'église, ce qui a esté exécuté en la présence des personnes soussignés ce seisième mai mil sept cent vingt six. Signatures : Guestard, Bataille.

Les paroisses de Bourgtheroulde, Infreville et Boscherville sont limitrophes de la forêt de la Londe. En 1731 un loup emporte un jeune enfant d'Infreville :Registre paroissial d'Infreville - Ce 28 d'aoust 1731 ont esté inhumés dans le cimetière par moy curé de cette paroisse la teste et les intestins de Charles Leroy fils de Claude et Françoise Huppin qui ont esté trouvés dans la forêt de La Londe, le dit Charles Leroy étant aagé de dix huit mois fut emporté par une beste inconnue le 20 du dit mois en présence de Claude son père qui ne pust empecher son enlevement, la ditte teste avec les intestins trouvés avec les hardes par Jacques et Jean Coignard ce qu'ils nous ont attesté et signé, la ditte inhumation faite en présence de Claude Leroy son père, Pierre Leroy son grand père, Jean Tierce qui ont déclaré ne savoir signer leur nom et Laurens Chouquet, Jacques Coignard et Jean Coignard qui ont trouvé la ditte teste avec les intestins et les hardes du dit enfant ont signé aussy. Les loups récidivent en 1735 à Bourgtheroulde et Boscherville : Registre paroissial de Bourgtheroulde - Ce jour d'hui 12e d'avril 1735 a esté porté dans le cimetière de cette paroisse une teste d'enfant appartenant à Pierre Jouanne de cette paroisse qui a été trouvée dans le bord de la forêt du roi triège des quatre mares par Charles Le Page Nicolas Petitvalet et autres qui ont été à la recherche dud.(du dit)  enfant lequel fut emporté par une beste féroce sur les sept heures du soir ce qui a esté vu par Margueritte Cornu veuve de Charles Le Secourable et Jacques Le Menu qui rencontrèrent lad. (la dite) beste féroce avec led. (le dit) enfant qu'elle emportoit dans la foret lesquels témoignages nous ont déterminé à ne vouloir manquer au respect qui est du à justice, à souffrir l'inhumation de la teste dud. (du dit) enfant dans le lieu saint.- Suivant le mandement de M. Sabire N. Sieur de Bois Labé lieutenant particulier assistant au bailliage de Pont Audmer anotés par le curé doyen du Bourgtheroulde a dresser pour inhumer le reste d'un cadavre d'un fils appartenant à Pierre Tubeuf de la paroisse de Boscherville lequel a esté trouvé dans une pièce de bled (blé) sur le fond de Madame la marquise de la Heuze lequel enfant a esté dévoré par une beste féroce, vu lequel mandement les restes dud. (du dit) enfant ont esté inhumé dans le cimetière de cette paroisse jour et an que dessus (*24 juillet 1735) - Le 4ème d'aoust 1735 en conséquence d'un mandement adressé à Monsieur le curé doyen de la part de Monsieur de Boislabé lieutenant particulier de M. Parin conseiller du roi au bailliage de Pont Audemer en date dud. jour pour inhumer les restes d'un cadavre d'une petite fille aagé de deux ans et demi appartenant à Michel Carité qui fut hier dévorée par une beste féroce, lad. (la dite) Inhumation a estée faite dans le cimetière de cette paroisse.

            Les loups n'étaient pas les seuls prédateurs. La forêt de La Londe était le repaire de bandes de brigands. Avant de la traverser pour se rendre à Rouen ou sa banlieue, les voyageurs se regroupaient de bon matin auprès de la porte nord du château de Bourgtheroulde, appelée « Porte des marchands ». Tous n'avaient pas la chance d'être saufs. Le lieutenant du  bailliage de Pont-Audemer se déplaçait pour mener une enquête dans le cas de mort violente ou suspecte. Les piliers de l'ancienne Porte des Marchands font partie du patrimoine de la commune. Ils sont encore visibles de nos jours.

            L'année 1736 fut d'une exceptionnelle sécheresse. Les récoltes ne suffirent pas à couvrir les besoins de la population. Les décès relevés en 1737 dans les registres paroissiaux de Bourgtheroulde et Infreville sont deux fois plus nombreux que la moyenne de l'époque. Les plus faibles, enfants et vieillards, furent les premières victimes. Comme en 1694, des familles entières disparurent. Le village est depuis des temps immémoriaux un lieu d'étape pour les troupes, logées chez l'habitant. En 1761, les logeurs obtiennent de l'intendant général de Rouen que Rabeaux, syndic militaire et Thomas, syndic collecteur, accusés de procédés injustes, soient démis de leurs fonctions et remplacés. François Patin, chirurgien, devient syndic militaire et Rayé syndic général. Patin a pour adversaire le notaire Marcotte, aussi receveur buraliste et propriétaire terrien, qui envie la charge de syndic militaire occupée par Patin. Chacun a ses partisans. Patin met tout en œuvre pour déstabiliser Marcotte. L'affrontement entre les deux hommes dure des années pendant lesquelles Patin et Marcotte usent de procédés divers pour régler leur querelle. Comme dans tout le royaume, le sort des

thérouldebourgeois est épouvantable, dépendant des cultures, sources de revenus et d'alimentation. Des années de disette, provoquées par des récoltes insuffisantes, amènent une terrible misère. En 1765, les paysans subissent divers impôts. La taille (*impôt direct sur les roturiers, aboli en 1789) augmente. Les corvées sont nombreuses et empêchent les laboureurs et les paysans de travailler la terre. Les ouvriers toiliers, cordiers, etc., ne peuvent se tenir à leur métier et gagner de quoi nourrir leur famille. Les passages des troupes sont de plus en plus nombreux, le logement des soldats contraignant. En octobre, une supplique adressée à l'intendant général prédit que « le bourg deviendra désert avant 3 ans », la misère s'aggravant. Les faits sont confirmés par une lettre du président de La Londe. L'intendant informe ce dernier qu'il aurait voulu accorder une diminution de la taille, mais que malheureusement il y a de l'augmentation cette année ! Le trésor doit être approvisionné pour le plaisir du roi... Les collecteurs d'impôts se contentent de remplir au mieux leur tâche, sans se soucier de l'état de misère, malgré les protestations écrites des habitants adressées à l'intendant de Rouen. Saint Amand, collecteur, est désavoué et se trouve obligé d'accorder une légère diminution à Osmont, fermier de M. de La Londe. Saint Amand en conçoit un profond dépit et attend le moment favorable pour se venger. En 1768, le Roumois est dévasté par de nombreux orages. Les récoltes sont perdues. Le roi accorde une diminution des tailles

En 1770, la variole sévit à Bourgtheroulde. Les soldats ne peuvent loger chez les malades. Patin en profite pour imposer des hommes de troupe aux « privilégiés », dont Marcotte, qui dépose plainte, son état de receveur buraliste le dispensant. Les autres « privilégiés » sont : le fermier du château, le garde du président de La Londe et son meunier, le maître de la poste courante, le chirurgien, le notaire, le sergent : ils sont tenus de loger les troupes. En 1771, la querelle reprend entre Patin et Marcotte. Marcotte est contraint de prêter ses chevaux et ses charretiers pour le transport des troupes. Il rameute les mécontents et adresse un mémoire des habitants de Bourgtheroulde contre le sieur Patin : le bourg compte 6 auberges et 108 logements, dont 8 trop pauvres. Une personne de chacune de ces huit familles est tenue de servir de guide et de porter les avertissements aux syndics des autres paroisses. Les soldats malades sont gardés par leur logeur pendant leur convalescence. Patin est accusé de garder une partie des billets de logement qu'il se fait rembourser par l'étapier. Les soldats sont environ 500 à chaque étape. Patin adresse les plus tapageurs chez Marcotte. C'est de bonne guerre, Marcotte ayant hérité du bureau des aides, auparavant confié à Patin. Patin est soupçonné de faire du trafic de bois avec le tenancier de la ferme de saint Nicolas qui appartient aux religieux de Saint Georges de Boscherville et se trouve dans la forêt. Les journaliers, fileurs de coton et les veuves sont trop souvent mis à contribution. Cette pétition n'étant pas signée, Patin dénonce cette accusation anonyme. Les habitants sont convoqués en assemblée générale le 28 avril dans l'église. L'affrontement entre les partisans de Marcotte et Patin tourne à l'avantage de ce dernier. Marcotte quitte le lieu saint après avoir demandé une suspension de séance. Il se plaint auprès du président de La Londe qui écrit à l'intendant M. de la Potterie. Les habitants sont convoqués pour une nouvelle réunion le 2 juin 1771. Entre-temps, le 24 mai, le régiment de Condé stationne dans le bourg. Patin adresse chez Gosse, garçon charron et protégé de Marcotte, six soldats qui  le rouent de coups et brisent son mobilier. Gosse est secouru par des voisins. Gosse et les soldats se retrouvent chez Patin qui confirme qu'il a conseillé aux soldats logés de lui casser bras et jambes, d'avouer où est caché son butin et d'avoir la fin de son s… de cadavre. Tout le monde est renvoyé chez Gosse qui subit une nouvelle fois coups et dégradations de son mobilier, ayant déclaré qu'il se plaindrait au président de La Londe. Les voisins ont recours à la garde. Les officiers rétablissent l'ordre. Patin dénonce la complaisance du curé doyen qui affirme n'être d'aucun parti mais menace le syndic, étant plutôt favorable à Marcotte. Les débats ayant lieu dans l'église, une émeute est évitée. M. de La Londe  suggère que M. Roger, frère du doyen soit nommé syndic militaire. Après un an de disputes, cabales et mutineries, Patin est démis de ses fonctions. Il est remplacé par Roger. Quelques années plus tard, Patin retrouve la charge de syndic.

           En 1772, et longtemps auparavant, toutes les paroisses du doyenné étaient agrégées à la Confrérie du saint Sacrement du Roumois. En 1773, le bétail est décimé par des maladies épidémiques. Un dégrèvement est accordé. Les laboureurs sont les moins éprouvés. La remise de la taille est concédée aux pauvres. En 1775, le village est misérable. Il n'y a plus d'hôpital. Les pauvres ont recours à la charité publique. Les secours, bien minimes, accordés par M. de La Londe et les religieux du Bec, qui perçoivent deux tiers de la dîme de la paroisse (*dîme : dixième partie des impôts en nature accordés au clergé et à la noblesse), ne suffisent pas. Famine et émeutes se propagent en Normandie. Des spéculateurs pillent les marchés, emportant les grains. Le peuple se fait des nourritures qui font horreur à l'humanité. Le gouvernement blâme le Parlement. Il est évident qu'il a existé alors le fameux pacte de famine, toujours nié. (Pacte de famine : le premier est supposé avoir existé en 1628 sous Louis XIII. Le second sous Louis XIV en 1709 après le décès du père Lachaise son conseiller. Conspiration tramée entre quelques riches et puissants sous Louis XV, vers 1765, pour opérer des disettes factices. Le dernier a lieu en 1783 pendant le règne de Louis XVI). En mai 1775, des incidents éclatent au marché de Bourgtheroulde, provoqués par des femmes de La Bouille et des environs qui exigent un prix élevé du blé qu'elles vendent. Un cavalier de la maréchaussée est secouru par ses camarades. La halle au blé n'est plus approvisionnée. Le 12 juin, le prix du blé est exorbitant. Il y a des scènes de pillage dans la région. Le syndic de chaque paroisse accuse les syndics voisins de leur adresser les troupes  faisant étape et qu'il faut approvisionner. En 1778, Bourgtheroulde est le chef-lieu d'un arrondissement pour la levée des troupes provinciales, comprenant : le bourg, Bosrobert, Bosc Regnoult, Le Theillement, Bosnormand, Angoville et Thuit-Hébert. Un tirage au sort entre garçons et veufs a lieu pour désigner les futurs soldats provinciaux. Cent quatorze sont présents sur cent trente-trois. Cinquante-sept sont exemptés, vingt-cinq infirmes, cinquante et un jugés trop petits. Ceux qui ne se sont pas présentés sont considérés comme fuyards. Sont dispensés : les fils de nobles, leurs domestiques et ceux des ecclésiastiques. En 1779, les riverains des routes sont tenus de procéder à leur bon entretien. D'où de nombreuses contestations et procès entre voisins. Le syndic Jean Baptiste Fouquet agit comme ses prédécesseurs et provoque les mêmes réclamations. Fouquet prend la fuite à la suite d'ennuis conjugaux. Il est accusé d'avoir battu sa femme à mort et est condamné par contumace. Las d'errer, il se constitue prisonnier et obtient « la Fierte » qui lui est accordée en 1786. (*Fierte de Saint Romain à Rouen : Chaque année, une seule annulation

Un rassemblement a lieu sur la place du Jardinet pour détromper le public sur les mauvaises intentions que l'on prête aux habitants du bourg. Il n'y a pas eu de députation de Bourgtheroulde à l'Auguste Fédération qui s'est faite le mardi précédent à Rouen : les habitants seraient des ennemis de la Patrie ? Le 10 août, la Garde Nationale n'a aucun règlement concernant la discipline. Un décret du 5 août de l'Assemblée Nationale ordonne aux municipalités de faire détruire toutes marques d'infractions et de séditions. Les perturbateurs sont condamnés et paient des amendes. Le 23, à dix heures, la patrouille ordonne à Coquelin de faire retirer les personnes qui consomment chez lui. Trois consommateurs récalcitrants traitent la femme de Coquelin de sacrée garce, sacrée p… et autres expressions déshonorantes pendant plus d'un quart d'heure. Peuffier, commandant, dépose un procès-verbal de Leclerc lieutenant de la seconde compagnie de la Garde Nationale. Il est demandé aux contrevenants de faire des excuses publiques à la Garde Nationale. Le 27, les laboureurs menacent de ne plus apporter leurs grains. C'est la disette. Le maire écrit aux autres maires du canton pour inciter les laboureurs à revenir. Le 11 septembre, Gabriel Jacques, capitaine de la Compagnie d'Infreville, dénonce Etienne Malilot de Berville, boulanger, qui est entré dans la halle aux blés et a parlé aux laboureurs vendeurs de blé, d'où achat à l'extérieur de la halle. Menaces de coups, injures. Malilot est arrêté et paie 24 livres d'amende. Le même jour, le procureur de la commune observe avec la plus grande douleur qu'il est obligé de dénoncer au corps municipal des émeutes et séditions occasionnées par des perturbateurs et mauvais sujets qui provoquent des bagarres avec la Garde Nationale et profèrent des insultes. Les fauteurs de troubles sont arrêtés pour être conduits dans les prisons de Pont Audemer. En réalité ils seront détenus à Bourg Achard. L'un d'eux, Cormery, demande pardon à ceux qu'il a offensés. Il est chargé d'enfants. Son père et Etard, son beau-père, se portent garants. Les parents et épouses de Thorel et Paquet demandent leur libération et paient les frais causés par leur arrestation.

Le 19 octobre, Peuffier dénonce les cabaretiers et cafetiers qui donnent à boire pendant les offices divins. Le 31, Neveu sergent, Tougard caporal et Fouquet capitaine, dénoncent des consommateurs d'eau-de-vie chez Coquelin à une heure indue. Le 4 novembre, des marchands vendent des étoffes et marchandises sur le pavé et places latérales du bourg les dimanches et fêtes, sans respect dû au culte divin. Ils sont frappés d'interdiction. Il y a récidive quand les femmes d'Adrien Petitvalet  et Piguy  de Boscherville vendent mercerie et mousselines sur le pavé, l'une devant chez Blesve maréchal ferrant, l'autre devant la porte de Payen huissier. Chez Collin, cafetier, plusieurs personnes boivent pendant la grand messe et les vêpres. Le même jour, à 11 heures du soir, Balthazard Bussy sergent de la seconde compagnie et six hommes trouvent chez Delangle, cafetier, plusieurs personnes dont Ygouf capitaine de la compagnie en habit de la Garde. Ils lui font remarquer que ce n'est pas là un exemple. Ygouf arrache épaulettes et hausse-col et déclare qu'il se fout de la Garde et de ses supérieurs. Tous des Jeanfoutres ! Il traite Bussy et les autres couillons de Jeanfoutres. Ygouf et ses compagnons se font apporter un petit pot d'eau de  vie en disant : Buvons et foutons-nous de ces couillons. ! Ygouf, aubergiste et capitaine d'une compagnie de la Garde Nationale, comparaît le 14 novembre. Un acte est dressé de ses déclarations, protestations et démission. Le corps de la Garde Nationale est convoqué pour l'élection d'un autre capitaine. Dubusc est lieutenant colonel. Deux procès-verbaux sont infligés à Delangle. Un avertissement est donné à Lallemand pour insulte à la Garde. Le 9, M. Pinchon est président de l'Assemblée Primaire du canton. Un procès-verbal reconnaît l'élection du juge de paix et de quatre assesseurs. Le canton est alors composé de dix-huit communes. Le 13, Thubeuf, abbé chanoine, secrétaire du conseil municipal, donne sa démission dans l'église. Boutin fils est nommé secrétaire. Son salaire est de 72 livres par an. Il prête serment le 20.

 Un état des revenus du Chapitre (*Conseil de religieux) de Bourgtheroulde est établi avec les noms des imposés. Le 28, des prud'hommes et assesseurs du juge de paix du canton sont nommés selon procès-verbal le  29 octobre en l'église : Fouquet, Cauvin, Peuffier, Ansoult prêtent serment.

Pendant deux dimanches, le sieur Bourry d'Angoville, a contrevenu à la défense d'exposer des marchandises et a étalé une charretée de sabots. S'il récidive, il paiera six livres d'amende ainsi que les dames Petivalet et Piguy. Le 5 décembre, la contribution patriotique de Saint Amand du 25 mai est jugée insuffisante. Il s'engage à acquitter 150 livres. Il vient d'hériter de son père. Le 11, requête du procureur d'Angoville : les chemins venant de Bourgtheroulde sont inaccessibles. Les propriétaires et riverains sont tenus de réparer les dits chemins. Le 12, récidive des femmes Piguy et « Tivalet » : ventes de marchandises dimanches et fêtes. Bagarre et insultes dans un cabaret provoquées par Monneaux marchand filassier. Le 27, Jean Neveu vient réclamer son fils, caporal des Gardes Nationales. Il se fait traiter de jeanfoutre et de roupillard par Etard qui lui jette un chandelier et lui donne des coups de pieds et de poings. 

1791 - Le jour du serment civique du curé de Bourgtheroulde est fixé au 24 janvier en exécution du décret du 27 novembre 1790.. La loi du royaume et décret de l'Assemblée Nationale du 27 novembre indiquent que les serments ecclésiastiques seront faits à l'issue de la messe. Deux commissaires sont nommés à l'adjudication du 27 pour la vente des biens nationaux à la salle du district de Pont Audemer. Le 6 février, en l'église de Bourgtheroulde, Robert Pinchon, curé, prête le serment civique. Il se rétracte par une lettre manuscrite en date du 12 février. (*Le pape Pie VI avait ordonné entre-temps aux prêtres de ne pas prêter le serment civique, craignant un schisme provoqué par la nomination des religieux par l'Etat français).Boutin greffier, rejoint son régiment. Il est remplacé par Tallon qui prête serment. Le 20, Lenoble et Neveu ont étalé et vendu devant leurs portes différentes marchandises pendant et après la messe et écopent de douze livres d'amende chacun. Le 26, le débit de viande est autorisé par adjudication pendant le carême pour cause de maladie et de passage de troupes de ligne. Un seul boucher, Coullebœuf, qui versera 75 livres aux pauvres, délivrera de la viande sous la surveillance de Dain, officier municipal. Le 8 mars, Jean Pierre Fouquet prétend qu'il ne possède pas 400 livres de rente, mais fait un don patriotique. Le 13, nouvelle altercation chez le cafetier Delangle chez lequel des consommateurs font du tapage. La Garde Nationale est traitée de garce quand Payen et Bourgallé s'interposent. Payen réplique en disant à la femme Delangle qu'elle est une canaille. Pierre Neveu est un des contrevenants. Payen l'accuse de l'avoir pris au collet. Le 9 avril, des jeux de banque sont tenus chez le cafetier Oursel par un homme et une femme de Rouen qui ne peuvent présenter des certificats de mariage ou de vie. Il leur est interdit de résider dans Bourgtheroulde au-delà de vingt-quatre heures. Le 7 mai une contravention est infligée aux boulangers Tassel et Le Bourg qui ont vendu du pain trop cher. Ils doivent se conformer aux ordonnances sur le pain et paient une contravention qui est versée aux pauvres de la commune. Le 15, le poids et la qualité du pain sont vérifiés chez les boulangers du village. Tassel et Le Bourg sont dans l'illégalité car ils se conforment aux poids de Rouen. Le 19, Tassel et Le Bourg abandonnent leur état.

Le 17 mai, Louis Pierre Pourpoint, maire, démissionne. Pour ne pas entraver les délibérations de la municipalité, il offre de laisser à sa disposition la chambre lui appartenant et cédée pour usage de maison commune.  Le 23, Mullot est nommé président des délibérations du conseil municipal. Il est fait mention d'insultes à l'égard de Pourpoint ainsi que de troubles et insurrection dans le bourg. Le maire démissionnaire est prié de reprendre ses fonctions. Pourpoint et le secrétaire de la municipalité ont reçu des menaces de mort. Pourpoint accepte de reprendre sa charge de maire. Tallon redevient secrétaire.

          Les écoles, maison pour le maître, maison commune, prison, sont transférées dans le presbytère, au-dessus des granges, pressoir, étables, écurie, devenues inutiles par suppression de la dîme. Il est demandé l'autorisation de vendre les bâtiments situés dans la cour du presbytère. Les deniers récupérés serviront à l'établissement des locaux communaux. Le 4 juin, Il est fait un rappel des décrets de l'Assemblée Nationale, en particulier sur la liberté. Le dimanche précédent, à l'issue des vêpres, les habitants de la paroisse ont requis des officiers municipaux qui en sortaient de faire supprimer les écritures funèbres et armoiries dans l'église et au dehors. Ce qui sera exécuté par des ouvriers au frais de la communauté. Le 23 juin, lecture est donnée d'un décret de l'Assemblée Nationale qui mentionne le départ du roi et de la famille royale. Les personnes sortant du royaume or et munitions seront arrêtées. Les fonctionnaires publics, gardes nationales, troupes de ligne de l'Empire, empêcheront tout soulèvement. Le décret est apporté par un cavalier de la gendarmerie de Bourg Achard. Les aubergistes et les loueurs de chevaux doivent déclarer leurs clients. La distribution des journaux et papiers sera faite par la directrice des postes.

Obligation est faite à tous les habitants de Bourgtheroulde de s'inscrire sur le registre de la Garde Nationale. Dans l'église, sur le pilier de l'Evangile, liste des inscrits ; sur celui d'en face, ceux qui ne le sont pas, d'où déchéance de citoyen actif. Le port des trois couleurs est obligatoire au chapeau ou à la boutonnière. Le 24, le major de la Garde Nationale, Michel Grandin, lit une lettre apprenant l'arrestation du roi. La cloche est sonnée à l'instant, la caisse battue dans les rues. Les habitants se rassemblent dans l'église. Un Te Deum est entonné par le cy-devant abbé Frigot. Le curé Léger lit une lettre invitant à participer à une messe chantée le lundi 27 à dix heures, suivie d'un Te Deum. Tous les officiers municipaux des paroisses environnantes sont invités. Les habitants ayant maison sur le Pavé (* Grande Rue) seront tenus de l'illuminer de neuf heures à minuit.

Le 26 juin, la veuve Lequesne, directrice de la poste aux lettres, ouvre par erreur une lettre adressée à François Béliard. Elle apporte le paquet destiné à Bourgtheroulde : le journal « l'Abeille » contient un passage contraire aux principes de la vérité, constitution, bonheur du patriote français. Le journal est retenu en la chambre de la mairie. Une lettre de Barbier, des Postes de Rouen, révèle que la dite Lequesne, son fils et sa fille, se sont plaints à lui des ordres de la municipalité de Bourgtheroulde d'avoir à présenter le courrier : une lettre de Paris adressée à M. de Marcouville qui est mandé sur-le-champ, une autre à M. Servinge capitaine au 14ème régiment d'infanterie à son passage à Bourgtheroulde qui lui a été remise à son arrivée. Le 30 juin, des bruits se répandent dans le bourg : des attroupements de personnes ont lieu dans deux maisons, l'une à Mauny, l'autre à Thouberville. Il est question de trafic de munitions et de chevaux. Deux commissaires sont nommés pour s'assurer de la vérité en faisant des perquisitions. Le secrétaire Tallon a cessé ses fonctions. André Bataille, clerc de notaire, le remplace le 30 juin et prête serment. Le 7 juillet, Ecorcheville et Dévé vont en députation à Pont Audemer pour préparer la fête de la Fédération d'Evreux. Le 28, une lettre est adressée à Pillon, collecteur des impôts de 1789. Le rôle ne lui a pas été fourni, a été fait par la municipalité, porté au conseiller de Rouen et n'a pas été remis à Pont Audemer. Le 21 août, Jacques Béranger, garde messier de M. de La Londe, est nommé pour le recouvrement du rôle des impositions de 1790. Vingt-huit habitants se présentent pour la défense de la liberté et le maintien de la constitution (*Garde Nationale). Les pauvres ne pouvant payer leur habillement, il est demandé qu'ils soient équipés par la Nation. Le 4 septembre, suite à une lettre du district de Pont Audemer, la ferme de Saint Nicolas, enclavée dans la forêt, n'est suspectée d'aucun danger. Dévé, capitaine de la Garde Nationale et sa compagnie se rendront à Evreux le 10. Le 8, Grandin, commandant de la Garde Nationale a requis de lui remettre vingt-deux fusils envoyés par le district de Pont- Audemer en vue du départ des gardes nationales pour Evreux. Devé, capitaine, démissionne. Il ne veut être que simple fusilier.

Le 16, violente diatribe contre la souveraineté, abus, privilèges… Un Te deum est chanté  dans l'église devant tous les habitants..Le 24, le conseil convoqué par le maire veut se retirer, ignorant la cause pour laquelle il a été requis. Le 1er octobre, réclamation de plusieurs personnes suite à l'effacement des écritures funèbres dans et hors de l'église. Ceux qui ont accompli ces actes sont payés.

 



12/04/2010
0 Poster un commentaire

A découvrir aussi


Inscrivez-vous au blog

Soyez prévenu par email des prochaines mises à jour